J'ai décidé d'arrêter mon cursus pour avoir le titre officiel de psychologue malgré l'obtention de ma licence. Je vous explique en détail ici mon cheminement et ma vision actuelle de la psychologie.

1 Août, 2023

De nos jours, seuls les cursus classiques universitaires sont reconnus par l’état et permettent d’obtenir un titre officiel. Par conséquent, étant formée par des organismes privés en tant que psychanalyste transpersonnelle, sophrologue…, mes titres et diplômes ne sont malheureusement toujours pas reconnus et sont identifiés comme « activité de santé humaine non classée ailleurs ». Néanmoins, je viens d’obtenir une licence en psychologie universitaire pour laquelle il ne me restait que 2 ans pour avoir le titre officiel de psychologue mais j’ai décidé d’en rester là. Je vous explique en détail ici mon cheminement et ma vision actuelle de la psychologie.

Contexte de reprise d’études

En 2020, j’ai décidé de reprendre les études universitaires de psychologie dans le but d’obtenir le diplôme officiel de psychologue. Pourquoi ? Honnêtement, je n’y pensais pas vraiment avant l’arrivée de la Covid mais cette période a provoqué en moi une grande frustration professionnelle. En effet, j’en ai eu marre d’être cataloguée en “thérapies alternatives” car personne ne savait me dire si je pouvais exercer ou non tellement ce statut est flou et non reconnu. Alors que les psychologues officiels avaient le droit de recevoir des patients, les professions dites alternatives n’y étaient pas autorisées. Alors que de nombreuses personnes étaient en souffrance, je ne pouvais pas les accompagner et j’ai trouvé ça violent. J’ai alors commencé à regretter ne pas avoir un métier « officiel ». J’ai compris un peu plus tard que cette souffrance me faisait en réalité rejouer une blessure personnelle bien plus profonde de manque de reconnaissance mais je n’en avais pas vraiment conscience avant.

A ce moment-là, s’est alors présentée à moi une opportunité. Un ami me fait part de son inscription à une des seules écoles qui proposent un cursus universitaire à distance : Paris 8. Je me suis donc lancée dans l’aventure. Sur un coup de tête, je m’inscris le jour des inscriptions et me voilà pourtant acceptée ! Me voici donc lancée dans ses études pendant 3 ans… et cela n’a pas été de tout repos ! En plus d’une énorme quantité de travail, mon projet de maternité s’est concrétisé. Par conséquent, reprendre ses études enceinte, puis en post partum et en parallèle de gérer son entreprise, je ne vais pas mentir, c’était intense ! Mais c’était sans compter sur ma détermination qui m’a permis de valider ma licence au cours de laquelle j’ai également réalisé un stage dans un CMPI (Centre Medico Psychologique Infantile) qui fut extrêmement enrichissant.

Avec l’obtention de cette licence, s’est naturellement posée la question si je poursuivais le cursus en MASTER ou non. La licence n’apportant rien de plus professionnellement, il ne me restait que 2 ans pour obtenir le titre de psychologue. Mais contre toute attente, j’ai décidé d’arrêter là et je vais vous expliquer pourquoi…

Un bel enrichissement

Tout d’abord, voilà ce que je retire de positif de ce parcours : cela m’a permis d’approfondir mes connaissances en psychologie, mieux connaitre les différents courants et l’histoire de la psychologie en France. J’ai acquis un certain bagage technique en psychologie clinique, en psychologie du développement, en psychologie sociale et en neurobiologie entre autres. J’ai donc pu solidifier et approfondir mes compétences de la psychologie, qui, ajouté à mes formations privées, me permettent d’avoir de solides compétences en psychologie avec des visions variées.

Cela m’a également permis de comprendre comment étaient véritablement diagnostiqués les troubles psychiques et a renforcé mes connaissances en psychopathologie, ce qui manque cruellement aux thérapies alternatives !

Enfin, mon expérience au CMPI a été très révélatrice en ce qu’elle m’a permis de voir concrètement ce qui se passe sur le terrain et non seulement par les dires de mes clients parfois passés par ce type d’établissement. J’ai pu suivre une psychologue, assister aux rendez-vous avec les psychiatres et les autres corps de métiers. Observer ce qui était mis en place dans ces établissements de référence en santé mentale aujourd’hui était d’une grande richesse pour moi qui suis déjà thérapeute. Cela m’a permis de comparer par rapport à ma pratique actuelle et ce que je propose à mon cabinet. J’ai donc pu constater ce qui se fait aujourd’hui réellement dans ce type de structures. Mais du coup, ça a questionné ma façon de penser la psychologie et m’a fait prendre conscience d’un certain décalage de vision. Je vous explique.

Une vision de la psychologie plus « scientifique » qu’humaine.

Je me suis rendue compte que la vision de la psychologie enseignée à l’Université et celle pratiquée aujourd’hui majoritairement en France dans les structures en santé mentale ne correspond pas à ma manière de comprendre le monde et d’accompagner les patients…

Malheureusement j’ai pu constater que malgré le bon nombre de cours administrés à l’Université (21 matières !), aucun ne traite réellement de l’humain et de comment l’accompagner. En effet, la majorité des cours expliquent ce qui se passe dans le cerveau en fonction des différentes pathologies mais aucun sur la façon d’accompagner véritablement ces pathologies. J’ai eu des cours sur les différents symptômes qui permettent de diagnostiquer une maladie mentale mais aucun outil pour aider les personnes dans ces maladies. Je n’ai eu aucun cours ou jeu de rôle pour apprendre à accompagner une personne en souffrance. De plus, à aucun moment il y a des modules de travail personnel sur soi, sur ses propres blessures … Pourtant, n’est-ce pas nécessaire d’avoir été accompagné sur sa propre histoire pour aider autrui ?

Je reste stupéfaite du manque cruel d’enseignement sur l’humain non dans une approche neurobiologique mais empathique de celle-ci. Les cours ne parlent que de théories scientifiques abstraites, toutes se contredisant les unes des autres dans lesquels les étudiants sont plongés sans aucun recul et vision claire. Ce constat m’a interpellée et je comprends mieux pourquoi la majorité des psychologues fraichement diplômés ne se sentent pas prêts à ouvrir leur cabinet libéral car sont perdus et livrés à eux-mêmes. D’ailleurs, la formation universitaire invite à travailler en structure avant tout, rien n’est réellement mis en avant pour entreprendre et ouvrir son cabinet. Nous sommes davantage formés à la recherche universitaire et au travail en structure qu’à l’entreprenariat mais c’est un autre sujet… J’ai découvert que la majorité des psychologues diplômés ne se sentent pas prêt (et pour cause) ce qui les poussent à faire (presque systématiquement) des DU (diplôme universitaire) après l’obtention du master afin de parfaire une formation insuffisante.

Un problème de diagnostic…

Le thème des diagnostics m’a toujours questionnée dans ma pratique. Je constatais déjà que certains diagnostics semblaient avoir été posés rapidement, sans le recul nécessaire à ce que cela peut engendrer chez ceux qui l’ont reçu… Malheureusement cette expérience a renforcé cette première impression que la psychologie d’aujourd’hui était faite pour mettre des gens dans des cases. Je sais à quel point les diagnostics rassurent les patients et que parfois poser un diagnostic permet de mieux comprendre son fonctionnement et d’aider la personne. Mais en réalité, ils servent surtout à administrer des médicaments et c’est important de le dire ! Et ça, ça n’est pas ma vision de la psychologie… Alors attention, je précise que je ne suis pas contre les médicaments et je les trouve très utiles dans certaines situations MAIS force est de constater que cela devient de plus en plus automatique (même pour les enfants!). Je sais que je ne vais pas me faire des amis par cet article et je dois préciser que je n’accuse pas les professionnels de santé pour cela. Je pense que c’est un problème sociétal et que les patients en sont autant responsables en ce qu’ils prennent les médicaments comme remèdes miracles. C’est exactement le même problème dans les maladies physiques, j’avais d’ailleurs fait un article sur ce thème. Le médicament étouffe le symptôme mais ne supprime pas la cause. Lorsqu’on arrête le médicament les problèmes reviennent. C’est aussi vrai pour la santé mentale. Il est important de comprendre que pour une dépression par exemple, les médicaments sont tout à fait indiqués dans le moment de crise. Ils sont comme une “béquille” pour soulager la personne et lui laisser le temps de mettre des choses en place. Mais le médicament ne sera jamais la solution unique ! Enfin, il est important de ne pas sous-estimer l’influence des laboratoires pharmaceutiques dans les psychopathologies…

De la même manière je pense qu’il est important de relativiser les tests et échelles de personnalité ou autres car ils ne peuvent pas refléter la totalité et la subtilité d’un être humain. Je suis parfois indignée de voir comment certains professionnels et patients alimentent un enfermement dans des étiquettes comme pour excuser leurs symptômes en ne s’attaquant jamais à la cause profonde du mal-être. Bienvenue la mode des HPI par exemple… La vérité c’est que c’est tellement plus difficile pour les patients (moi la première) de faire des années de thérapies et des exercices chaque jour pour préserver son bien-être que d’avaler un médicament ou de se cacher derrière un diagnostic. Je pense personnellement et professionnellement que la thérapie est souvent un des seuls remèdes de fond. 

Une manière d’accompagner…

Lors de mon immersion en CMP, j’ai pu rencontrer des professionnels formidables qui ont à cœur d’accompagner au mieux les patients. Je dois avouer que ces structures font du mieux qu’elles peuvent et j’admire leur approche pluridisciplinaire. Malheureusement le manque de temps et de moyens est palpable et ne permet pas toujours des accompagnements qui ont du sens…

De plus, dans la manière d’accompagner, les psychologues sont souvent restreints, que cela soit en terme de temps de consultation mais aussi de distance professionnelle. Il est plutôt prôné par les universités que les psys n’ont pas le droit de donner leur avis. Ils doivent uniquement faire parler la personne en l’aidant à faire des liens mais jamais en lui indiquant une direction. De mon point de vue, je pense que le thérapeute doit « se mouiller », il doit partager son avis. C’est également son rôle d’accompagner l’autre à parler de choses dont il n’aurait pas forcément pensé  pour l’aider à aller plus loin. Bien entendu, je le redis ici, le patient doit toujours avoir ses propres réponses et le thérapeute n’est qu’un accompagnateur mais il doit l’aider à aller en profondeur. Je pense que le rôle du psy devrait est aussi de dire s’il pense que c’est juste ou non, autrement à quoi sert-il ?

Enfin, vous savez à quel point les questions existentielles me passionnent et je ne peux aujourd’hui concevoir une véritable thérapie sans inviter la personne à se questionner sur ses croyances profondes, sur son rapport à la vie. Il me semble que pour trouver un réel épanouissement, il est difficile de faire de la psychologie sans un minimum de philosophie, c’est d’ailleurs l’histoire elle-même de la psychologie qui veut dire littéralement « science de l’âme », trop souvent oubliée. Malheureusement, parler de spiritualité est complètement banni dans les universités de psychologie aujourd’hui. J’irai même plus loin, la spiritualité est même souvent considérée comme un symptôme délirant chez les patients qui en font l’écho. Je suis consciente qu’il faut raison garder car c’est parfois le cas mais ça ne devrait pas être si extrême. A trop vouloir réduire la science au matérialisme radical, on en oublie l’âme de la psychologie et donc celle de l’Homme

Néanmoins, je souhaite également exprimer ici le fait que je ne me retrouve pas non plus pleinement dans les courants new-age de développement personnel, alternatifs et spirituels qui s’écartent complétement des référentiels théoriques de la psychologie. C’est d’ailleurs également pour cela que j’avais entamé ce nouveau cheminement. Comme toujours, je prêche la voie du milieu sans tomber dans les deux extrêmes d’une psychologie relayée à la neurobiologie ou aux courants new-age déconnectés de la réalité.

C’est pourquoi, il me parait important de pouvoir réconcilier ces deux courants dans une approche plus juste et de laisser avant tout à chacun la responsabilité de son bien-être et de sa santé mentale.

Conclusion

Je me retrouve donc face à un désaccord majeur par rapport à ma vision de l’accompagnement et de la psychologie. Puisque je ne peux rentrée dans un moule et prôner un cadre professionnel qui oublie de s’intéresser aux profondeurs de l’être et au sens de la vie, je ne peux pas continuer ce chemin officiel de psychologue. Cette expérience m’a rappelé les dérives du système de santé mentale actuel et donc qu’elle était la vraie valeur de mes accompagnements. Cela a renforcé ma légitimité et ma confiance en ce que j’apporte de différent. et en ma manière de voir la psychologie aussi décalée soit-elle du consensus. C’est donc pour cela que j’ai décidé de ne pas aller chercher ce titre de psychologue qui me donne le sentiment de perdre mon âme en essayant de rentrer dans un moule social qui ne correspond pas à mes valeurs. Je me considère aujourd’hui comme une véritable psy de l’âme. Je ne dis pas qu’un jour je ne reprendrais pas ce parcours si les thérapies alternatives sont trop mises à mal. Néanmoins ma vision holistique de la psychologie restera toujours intacte bien qu’évolutive. Je continuerai à vous accompagner dans un engagement et une profondeur qui a du sens. Comme le disait Irvin Yalom (2008), le psychologue doit être capable de se mettre à la place de son patient, sans perdre sa propre identité.

 

Auteur : Angélique Brisard

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